Edito du mois d'avril 2019.
10 avr. 2019...UN CIEL NOUVEAU ET UNE TERRE NOUVELLE. » Ap21, 1
Un émerveillement, toujours plus grand, une joie sans faille et un enthousiasme sans démenti saisissent les cœurs et les esprits de nos contemporains, à la vue des images et photos de plus en plus précises que nous renvoient les télescopes puissamment outillés depuis l’espace. Quelles splendeurs à contempler dans notre système solaire et au-delà ! Mais force est de constater aussi que notre humanité a une conscience plus vive des fragilités qui menacent un héritage universel aussi colossal qu’est la planète. Des voix s’élèvent pour crier à temps et à contretemps l’urgente nécessité de l’avènement d’une civilisation plus constructive que destructrice. En ce temps de belles célébrations des fêtes de la Passion et de la Résurrection du Christ Jésus, nous voulons relire ce verset de l’Apocalypse de Saint Jean. Citons-le intégralement : « Alors je vis un ciel nouveau et une terre nouvelle, car le premier ciel et la première terre ont disparu et la mer n’est plus. » (Chapitre 21 verset1).
DANS LE CONTEXTE, LE VERSET.
Il n’est peut-être pas anodin de redire que le mot « apocalypse » n’est nullement pas à prendre et comprendre dans le sens devenu courant de catastrophe. « Apocalypse » est la traduction du terme grec qui signifie révélation, dévoilement, décryptage. Dans le cas de la Bible, le livre de l’Apocalypse représente une forme particulière de« la tradition prophétique qui semble s’être développée à partir du IIème siècle avant Jésus Christ. » À la différence du genre littéraire classique des prophéties bibliques basées sur différents oracles, c’est-à-dire des paroles dites de la part de Dieu, l’Apocalypse, se base plutôt sur des visions. C’est au cours de l’une de ses visons que Jean déclare ce que vous venez de lire. Ce verset se situe dans l’avant dernier chapitre de l’ensemble du livre, après des visions plus complexes sur les combats spirituels entre les forces du mal et le Christ Victorieux. Le chapitre 21 prolonge la célébration triomphale de l’avènement d’un temps de renouvellement. D’ailleurs, c’est bien que déclare « Celui qui siège sur le trône : « Voici, je fais toutes choses nouvelles. » (21,5)
DANS NOTRE TEMPS, CE VERSET.
L’une des caractéristiques de la Parole de Dieu réside dans sa fécondité atemporelle. Voilà pourquoi, elle est source inépuisable d’inspirations et d’aspirations pour toutes les générations, toutes les civilisations. À juste titre, Jésus déclarait déjà : « Le ciel et la terre disparaîtront plus facilement que ne tombera de la Loi (et les prophètes) une seule virgule. » (Luc 16, 17)
Une première approche d’interprétation est une invitation. Elle est basée sur l’idée que le temps liturgique des fêtes de Pâques nous invite à faire du neuf, à bâtir du nouveau, à quitter notre monde ancien, notre vieille intériorité, nos carcans anciens pour rayonner de la Lumière du Christ Jésus. Lui qui est descendu dans les abîmes des ténèbres de la violence, du mal et des malheurs, de la mort et qui en est remonté, ressuscité, Cette interprétation revient sous la plume des grands écrivains et messagers de l’Évangile. L’apôtre saint Pierre affirme clairement : « Nous attendons selon la promesse, des cieux nouveaux et une terre nouvelle où la justice habite. » (2P3, 13)
Par une métaphore culinaire digne des grandes boulangeries et pâtisseries, Saint Paul invitait déjà les Corinthiens en ces termes : « Purifiez-vous donc des vieux ferments et vous serez une pâte nouvelle, vous qui êtes comme le pain de la Pâque, celui qui n’a pas fermenté. Célébrons donc la fête, non pas avec du vieux levain, ni du levain de méchanceté et de perversité, mais avec les pains sans levain : dans la pureté et dans la vérité. »
(1Co5, 7-8) Nous pouvons dire que le Ciel nouveau et la terre nouvelle dont parle l’Apocalypse ne sont pas extérieurs mais surtout intérieurs. Le ciel de notre cœur où peuvent s’accumuler les nuages de rancunes et de rancoeurs, injustices et égoïsmes; la terre de nos relations où, éclatent tous les jours, les orages des haines et violences les tempêtes des guerres meurtrières. Le ciel de notre âme qui peut être polluée par le mal-être et la terre de notre esprit qui peut aussi se pervertir. Il n’y a pas de télescopes, si sophistiqués soient-ils, qui puissent alerter autrement. Sinon notre conscience individuelle et collective, notre quête spirituelle et intellectuelle, notre Lumière intérieure. La résurrection du Christ est une fête des victoires de la Lumière de Dieu en chacune et chacun. Nous comprenons mieux la belle prière de Dom Helder Camara : « Seigneur, fais de moi un arc-en-ciel de bonté, d’espoir et de paix. »
Une deuxième approche du verset est à la fois théologique, prophétique, politique et catholique.
Elle est théologique : car nous croyons à la suite d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, et nous professons à la suite d’une immense lignée de croyants que le Ciel et la Terre ainsi que la mer et leurs merveilles sont l’œuvre de Dieu. Il en a confié la gérance à tous les hommes et femmes de toutes tribus, langues peuples et nations. (Ap5,9)
Elle est prophétique : Car le ciel et la terre dont parle ce verset ne sont pas ceux que nous connaissons. C’est à venir et c’est à faire advenir. Ce qui est prophétique exige une critique de la réalité actuelle pour faciliter la créativité d’une autre réalité. La prophétie demande toujours à chacune et à chacun d’écouter, de se rendre disponible à l’appel du Tout Autre.
Elle est politique : Car le Ciel et la Terre relèvent du « Bien Commun » qui doit devenir le « Bien de la Communauté » en vue de la « Communauté du Bien » et pas seulement des biens.
Le Pape François à la suite de ses prédécesseurs écrit dans « Laudato’Si » : « La culture écologique ne peut se réduire à une série de réponses urgentes et partielles aux problèmes qui sont en train d’apparaître par rapport à la dégradation de l’environnement, à l’épuisement des réserves naturelles et à la pollution. Elle devrait être un regard différent, une pensée, une politique, un programme… » (Chapitre III ; §111)
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Elle catholique : Car elle est universelle. La terre est notre patrimoine universel et le ciel notre destinée commune. Enfants de la Terre, quels que nous soyons et qui que nous soyons, sous le même ciel. En devenant, Fils dans notre Humanité, habitant notre Terre, ayant dormi dans les entrailles de la terre par sa mort, monté au Ciel par son Ascension, Jésus Christ, Le Ressuscité demeure le Frère universel qui nous introduit dans un « Ciel Nouveau et une Nouvelle Terre ».
La veille hurlait de haine la damnation
Sur la tête d’un innocent bouc émissaire.
Passions et trahisons en leurs corollaires
Traversent les destinées en dévoilements.
Servantes et serviteurs des commencements
Quel Amour dira votre Transfiguration ?
Le jour dansait déjà de toute allégresse
Sur le beau rythme de la Bonne Nouvelle.
La vie en sa puissance toujours plus belle
Offrent des surgissements encore plus brillants.
Messagères et messagers aux pas souriants
Quel mystère a dissipé votre tristesse ?
Le soir chancelait encore de vives douleurs
Sur le long chemin des incompréhensions
Le Vieux Manuscrit percé de mille illusions
Illumine encore l’horizon d’Espérance.
Pèlerins épuisés de fardeaux d’errance
Quel Inconnu de passage a ouvert vos cœurs ?
L’aurore souriait déjà de victoire
Sur le tohu-bohu et ses obscurités.
Le doute et le désespoir en renversements
Ouvrent de nouveaux sillons d’ensemencements.
Jeunes bourgeons de grâces et de luminosités
Qui peut prévoir la gloire de votre histoire ?
Père Jean-Parfait CAKPO