C'EST EN ESPERANCE QUE NOUS SOMMES SAUVES (Rm 8,24).

Il faut d'emblée faire la distinction entre espoir et espérance. L'espoir s'appuie simplement sur les possibilités humaines. Les hommes ont l'espoir de résoudre les grands problèmes auxquels ils sont confrontés : la faim, le réchauffement climatique...ils comptent sur leurs capacités pour résoudre ces questions et ils espèrent que les progrès scientifiques et techniques les délivreront de la menace des cyclones, des tremblements de terre et autres cataclysmes. L'espoir s'appuie sur les possibilités de l'homme, mais l'Espérance, elle, s'appuie sur Dieu. Nous aspirons à être généreux, bienveillants, totalement intègres, patients, capables de pardonner, doux.

Nous pouvons rêver d'y parvenir avec notre seule volonté, mais force est de constater qu'avec nos seules énergies nous n'allons pas très loin. Nous restons en deçà de ce que nous voudrions. Nous avons besoin de nous ouvrir à Dieu, à l'aide qu'il veut donner. L'espérance vient au secours de l'espoir.

Baptisés nous sommes renés à la vie dans le Christ. St Cyrien disait même « le Chrétien est un autre Christ ». Nous sommes appelés à refléter ses sentiments, ses réactions. La grandeur de cet appel peut nous décourager. Mission impossible? C'est là qu'intervient l'espérance. Nous avons à nous appuyer sur le Seigneur qui nous dit lui-même : « Sans moi vous ne pouvez rien faire » (Jn 15,5). Il y a des démarches qu'avec nos seules forces nous ne pouvons pas accomplir.

Si nous nous ouvrons au Seigneur, il peut nous faire accomplir de beaux cheminements. François VARILLON écrit: « Notre espérance n'est pas finalement d'être heureux, mais d'être enfin capables d'aimer sûrement, sans mélange d'égoïsme, sans le moindre repli sur soi. Ici-bas, nous n'aimons pas de cette manière là, mais nous espérons que Dieu nous donnera d'aimer comme il aime, lui, c'est-à-dire sans regard sur soi » (Vivre le christianisme p. 204).

Espérance! Nous vivons parfois des situations humainement très difficiles, voire impossibles à assumer et à surmonter, mais en accueillant le Seigneur, nous parvenons à tenir debout, voire à construire du neuf, à nous construire au cœur de l'épreuve. St Paul va même jusqu'à dire que c'est lorsqu'il est conscient de sa faiblesse et qu'il s'ouvre au Seigneur qu'il devient fort car alors il permet à la force du Seigneur de se déployer en lui. « Je n'hésite pas à mettre mon orgueil dans ma faiblesse afin que la puissance du Christ habite en moi...lorsque je suis faible, c'est alors que je suis fort » (2 Co 12,9-10)

Espérance ! D'autre part l'homme est confronté à la mort et en même temps il refuse de disparaître totalement. Il aspire à vivre pleinement et éternellement. Vatican II indique: « C'est en face de la mort que l'énigme de la condition humaine atteint son sommet. L'homme n'est pas seulement tourmenté par la souffrance et la déchéance progressive de son corps, mais plus encore par la peur de la destruction définitive. Et c'est par une inspiration juste de son cœur qu'il rejette et refuse cette ruine totale et ce définitif échec de sa personne. Le germe d'éternité qu'il porte en lui, irréductible à la seule matière, s'insurge contre la mort.

Toutes les tentatives de la technique, si utiles qu'elles soient, sont impuissantes à calmer son anxiété: car le prolongement de la vie que la biologie procure ne peut satisfaire ce désir d'une vie ultérieure, invinciblement ancré dans son cœur » (G.S. 18). Mais l'homme ne peut pas se donner à lui-même de vivre éternellement. La vie éternelle est un don de Dieu, la promesse de Dieu. Nous lisons dans l'Ancien Testament: « Dieu a créé l'homme pour une existence impérissable » (Sg 2, 23). Jésus nous dit: « Je suis la Résurrection et la Vie, celui qui croit en moi, même s'il meurt, vivra et tout homme qui vit et qui croit en moi ne mourra jamais » (Jn 11,25-26).

La veille de son départ il dit: « Dans la maison de mon Père, beaucoup peuvent trouver leur demeure, sinon est-ce que je vous aurais dit « Je pars vous préparer une place? » (Jn 14,2). Il connaît une mort violente et trois jours après les siens le revoient au milieu d'eux, rayonnant de vie, de lumière, de beauté, ressuscité. Les disciples comprennent vite qu'il n'est pas ressuscité pour lui seul mais pour entraîner tous les hommes dans sa Résurrection, St Paul en particulier qui affirme « Jésus, nous le croyons, est mort et ressuscité de même nous le croyons, ceux qui se sont endormis, Dieu à cause de Jésus, les emmènera avec son Fils » (1 Th 4 ,14) . Il écrit aussi: « Notre cité à nous, est dans les cieux, d'où nous attendons comme Sauveur le Seigneur Jésus-Christ qui transfigurera notre corps de misère pour le rendre semblable à son corps de gloire » (Ph 3,21). St Jean, de son côté, écrit: « Dès maintenant nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous sommes ne paraît pas encore clairement. Nous le savons: Lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu'il est » (1 Jn 3,2). Grâce à Jésus, nous avons l'espérance de la Vie Éternelle. L'espérance qu'il nous donne vient au secours de notre désir de vivre. Nous sommes confrontés à la mort, notre univers l'est aussi.

Jésus se trouve devant le Temple de Jérusalem. Un très beau bâtiment. Il avait fallu 50 ans pour le construire. Il suscitait l'admiration de tous les visiteurs. Jésus lui aussi admire et en même temps dit : «Il n'en sera pas pierre sur pierre, tout sera détruit. » (Lc 21,6). Il souligne la fragilité de toute réalité visible. Tout aura une fin. Les savants le disent aussi, un jour le soleil s'éteindra. Il n'y aura plus de vie. Le temps lui-même aura une fin. Quand ? Cette question ne préoccupe pas Jésus et il nous demande de ne pas nous laisser égarer par ceux qui annoncent une fin imminente. Dieu seul est maître de l' histoire. L'avenir lui appartient. Lorsque Jésus évoque la fragilité des réalités visibles il évoque aussi des jours difficiles, des guerres, des pestes, des famines et des catastrophes diverses (Lc 21/7-36). Il décrit le monde de toujours, de maintenant donc. Évoquant les souffrances, les drames de toujours, il dit : « Ne vous effrayez pas » (Lc 21/9). Cela ne veut pas dire « Ce n'est pas grave ». Si, c'est grave. Mais il veut dire « Ces évènements ne sont pas le dernier mot de l' histoire. Redressez-vous. Prenez courage ! Dieu aura le dernier mot. Un jour, le jour que lui seul connaît, le monde tel qu'il est aura une fin pour laisser place au monde que Dieu fera advenir. Plusieurs fois Jésus évoque son retour en gloire « Alors ils verront le Fils de l'homme venir entouré d'une nuée dans la plénitude de la puissance de la gloire » (Lc 21,27). A la fin du récit de l'ascension de Jésus nous lisons : « Comme ils fixaient encore le ciel où Jésus s'en allait voici que deux hommes en vêtements blancs leurs dirent : « Gens de Galilée, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Ce Jésus qui vous a été enlevé pour le ciel reviendra de la même manière que vous l'avez vu s'en aller vers le ciel » (Ac 1,10-11). Pourquoi Jésus reviendra-t-il ? Sinon pour achever son œuvre de salut de l'humanité et de l'univers et conduire l'humanité et la création toute entière à leur accomplissement. Saint Pierre écrit : « Nous attendons, selon la promesse du Seigneur, des cieux nouveaux et une terre nouvelle où habite la justice » (2 P3,13). Vatican II s'appuyant sur l'Écriture Sainte enseigne : « Nous ignorons le temps de l'achèvement de la terre et de l'humanité..., mais nous l'avons appris, Dieu nous prépare une nouvelle demeure et une nouvelle terre où règnera la justice et dont la béatitude comblera et dépassera tous les désirs de paix qui montent au cœur de l'homme » (G .S 39) et « le Seigneur est le terme de l'histoire humaine, le point vers lequel convergent les désirs de l'histoire et de la civilisation... Vivifiés et rassemblés en son Esprit, nous marchons vers la consommation de l'histoire humaine qui correspond pleinement à son dessein d'amour : « Ramener toutes choses sous un seul chef, le Christ, celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre »(Eph 1 ,10) (G.S. 45). Le Seigneur lui-même le dit : « Je suis l'alpha et l'oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin » (Ap 22/12-13).

Jésus est venu la première fois en serviteur souffrant. Il reviendra dans la gloire et en lui seront rassemblés, transfigurés, tous les hommes et toutes les réalités terrestres. Il achèvera son œuvre lorsqu'à la fin des temps il dira sur le monde ce qu'il dit sur le pain lors de nos célébrations : « Ceci est mon corps ». Le monde sera totalement accompli lorsque en Jésus il sera transfiguré et devenu son corps. Faisons nôtre la prière de Paul : « Puisse t-il illuminer les yeux de notre cœur pour nous faire voir quelle espérance nous ouvre son appel » (Ep 1,18) Soyons un peuple à l'espérance tenace.

Père Michel MARIE

C'est en espérance que nous sommes sauvés.
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