« AMEN, AMEN, JE VOUS LE DIS : JE SUIS LA PORTE » Jn 10,9.

L’année jubilaire, à nous tous proposée par le Pape François sur la DIVINE MISÉRICORDE, est déjà ouverte par les célébrations de l’ouverture solennelle des Portes saintes dans tous les diocèses du monde : de Rome jusqu’à Bangui en passant par Paris, Bayeux et Lisieux. Et ce, depuis le 8 Décembre 2015, en la solennité de l’immaculée conception marquant par la même occasion, le cinquantième anniversaire de la clôture du Concile Vatican II. Ainsi « Portes et Clôture » se font signe pour une grande ouverture, pourrait-on dire. L’occasion est plus que belle de méditer sur la symbolique.

Car, qu’elle soit dans la pierre taillée, dans du bois sculptée ,dans le fer forgée, en acier ciselée, de bronze ou de matières synthétiques, qu’elle soit simple ou blindée, automatique ou manuelle, la porte est une réalité universelle culturelle, socio cultuelle, qui nous appelle et nous interpelle dans ses multiples significations.

Avant tout, la porte est un lieu de passage. Elle permet de séparer l’intérieur de l ‘extérieur. Elle s’offre comme une étape dans l’élan vers devant. Elle est témoin du visible et de l’invisible, de l’intime et de » l’estime » . La porte a toujours double face. Toute porte évoque une articulation forte et tangible avec la réalité poly-dimensionnelle. Pour franchir la porte, il y a parfois un temps de préparation ou d’attente. Parfois on laisse ses chaussures. Il est possible de penser qu’après avoir franchi certaines portes le sujet n’est plus tout à fait le même qu’avant.

Dans le contexte biblique surtout vétérotestamentaire, la porte révèle un pont jeté entre les deux mondes : celui de Dieu et celui des hommes. Les portes du Ciel sont symboles de bénédictions divines pour la terre. (Ml 3,10 / Ps 78,23). Le Grand Patriarche Jacob dans le Livre de la Genèse, après une expérience onirique fondatrice va s’exclamer : « Vraiment ce lieu est redoutable ! Il n’est autre que la maison de Dieu, c’est la porte du ciel. » (Gn. 28,16)

Plus largement les psalmistes célèbrent la porte comme signe de sécurité pour la ville, porte qui, bien gardée, permet aux habitants de vaquer aux affaires commerciales ou politiques et religieuses. (Ps 69,13)

Mais la porte prend une coloration métonymique plus forte encore lorsqu’elle désigne le Sanctuaire, la Synagogue, le Temple. Aussi, le pèlerin qui monte à la Ville Sainte doit-il franchir les portes saintes pour s’approcher d’Adonaï, le Seigneur afin d’être justifié. (Ps 100,4/ 118,20)

Les portes sont donc l’expression de la puissance salvifique de Dieu. Dans l’enseignement des prophètes, la porte appelle à une démarche intérieure, un pèlerinage spirituel qui consiste à mettre de l’ordre dans sa vie. Le prophète Amos déclarera qu’il ne sert à rien de fortifier les portes extérieures de la ville pour éviter la ruine si le cœur n’y est pas. (Am 5,15) Quelques siècles plus tard, Jésus déclare dans son enseignement : « C’EST MOI LA PORTE. (Jn 5,2) La porte du troupeau. En hébreu « anôki schaar ha-tzôn », Jésus s’inscrit dans l’immense chaîne des prophètes et dans le sens de l’Alliance pour en renouveler la consistance. On peut lire dans Néhémie 3,1 l’épisode de la porte construite par le grand prêtre Eliaschib et ses frères prêtres. La porte des Brebis qui s’appelle en hébreu Bethzatha. C’est là que Jésus va guérir l’homme paralysé depuis trente-huit ans. (Jn 5,1-18)

PORTE, SIGNE D’ESPÉRANCE ET D’AMOUR. Par sa déclaration solennelle, « Jésus-Christ, notre grand Dieu et Sauveur » (Tt 2,13) dévoile à tous, qu’en lui sont portées à leur total accomplissement, les promesses divines de « restauration » faites à l’humanité dans la grâce : Sur Lui, repose, l’Esprit Saint, Consolateur, pour guérir, libérer, relever, sanctifier… (Isaïe 40,1ss/ 61,1ss) Jésus est donc la vraie porte du Ciel sur terre. (Jn 1,51) Puisqu’il introduit ses brebis aux pâturages de la vie qu’il est venu donner en abondance. (Jn10,10) et par amour. Il attend seulement que nous puissions lui ouvrir les portes de notre cœur à l’instar du fiancé du Cantique des Cantiques. (Ct 5,2ss) Bien plus, Jésus dévoile qu’il est la porte parce qu’il s’est emparé « des clés de la Mort et de l’Hadès. » (Ap 1,18) Il fait entrer désormais dans la Jérusalem céleste aux Douze Portes. (Ap 21,12)

PORTE, SIGNE DE CONVERSION ET DE MISÉRICORDE. Dans sa bulle d’indiction du Jubilé de l’an 2000 « Incarnationis Mysterium » Saint Jean Paul II soulignait que la Porte sainte « évoque le passage du péché à la grâce que tout chrétien est appelé à effectuer. Quant au Pape François, dans sa Bulle d’indiction Misericordiae vultus, il indique que « passer la Porte sainte, chacun devra faire un pèlerinage (...) signe que la miséricorde est un but à atteindre, qui demande engagement et sacrifice. » (§ 14)

PORTE, SIGNE DE LIBERTÉ. Lorsque Jésus déclare qu’il est la porte, il ajoute : « si quelqu’un passe par moi, il pourra aller et venir et trouver de quoi se nourrir. » (Jn 10,9 a ) La porte favorise et réalise à la fois un franchissement et un affranchissement. Un franchissement des seuils et un affranchissement des carcans. Car quiconque connaît la porte peut s’offrir vraiment la liberté d’aller et venir. Avec le Messie, la vie n’est pas de piaffer et de se routiniser en faisant du sur place mais d’aller au large de soi en traversant les portes :

Aller son chemin

Sereinement

Sûrement

Aller son chemin

Vers l’idéal de sa mission

Sur le tracé de sa vocation

Aller son chemin

Jusqu’au bout de demain

Sans crainte du lendemain

Aller son chemin

À travers le fatras des mensonges

À travers l’inflation des appréhensions

À travers la tempête des persécutions

À travers la sinuosité des barrages

À travers le chaos des destructions

À travers le danger et ses rallonges

Aller son chemin

Par-delà

Les murailles de la haine

Par-delà

La routine et la rengaine

Par-delà

L’obstination des imposteurs

Par-delà

Le marécage des prédateurs

Aller son chemin

Telle la vérité

Malgré les mensonges

Telle la crue Malgré les digues

Tel le vent Malgré les volets

Telle la lumière Malgré les ténèbres

Aller toujours son chemin

Gardant mémoire d’où l’on vient

Le gouvernail dans la trajectoire

Tel est le cap de la victoire.

Père Jean-Parfait CAKPO.

Je suis la Porte...
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